2) La période de l’après-guerre et du renouveau de la musique engagée : 1950 – 1989

Dans les années 50, la France se retrouve dans une phase transition; c’est celle de l’après guerre avec ses nouveaux conflits, comme celui de la guerre froide ou des guerre coloniales, faisant face à une climat pourtant prospère : celui des Trente glorieuses. C’est cette période marquée par l’apparition des plaisirs de la consommation, des progrès techniques, du baby boom mais aussi des nouveaux contextes politiques, qui développera et portera à son paroxysme le style engagé mais aussi les chansons à texte.

En vérité ce fut la chanson intellectuelle qui connut un grand succès amenant la révélation de nombreux artistes, comme George Brassens, Jacques Brel, Léo Ferré, Boris Vian et bien d’autres à leur tour.

La chanson commence donc à prendre un caractère politique dans lequel chaque artiste se permet de révéler leurs propres opinions politiques. Georges Brassens dans sa chanson “Le Gorille” critiquera la peine de mort, cette chanson choquant son époque sera pour sa part censurée. On pourrait encore parler de Léo Ferré qui à travers sa musique rappelle ses idées anarchistes, c’est le cas dans “L’oppression” ou dans “Ni dieu ni maître”.

Boris Vian fut l’un des plus grand critiques de la société de son époque comme avec “Complainte du progrès” où il dénonce la société de consommation. Avec Le déserteur, il manifeste son anti-militarisme et cette chanson connaît à son époque une véritable censure, étant jugée comme scandaleuse. Il est l’un de ceux qui savent jouer du comique pour cacher des textes contestataires et engagés tels que “La java des bombes atomiques”, “La java javanaise”…

C’est la révolution culturelle et les mouvements contestataires qui partageront les années 1960. C’est pourquoi les différents genres musicaux traduiront dans un premier temps le refus des règles imposées par la société, critiquée par un grand nombres d’artistes.

Il existe une certaine «haine» à l’égard du milieu bourgeois, Brel le démontrera dans sa chanson “Les bourgeois”.

Peu à peu c’est une sensibilité accrue qui dérive vers le partie de gauche, la majorité des musiques engagées critiquent alors le militarisme et le colonialisme. Laura Diana chante “Marie Dominique” qui parle des illusions perdues des soldats d’Indochine. Les adhérents du parti communiste multiplient à leur tour les couplets militaristes, dont Yves Montant avec « Quant un soldat » ou « Giroflé-Girofla ». Ces mouvements contestataires s’attaquent aussi aux tabous des mœurs comme “Jolie môme” de Léo Ferré en 1960. L’apparition des médias tels que la télévision ou la radio permettent une permettent une plus grande diffusion de ces chansons dîtes engagées.

La révolution de l’année 1968 déclenche un nouveau phénomène social, les jeunes forment alors leur propre groupe basé sur le refus des règles et des valeurs qui leur sont imposées et leur véritable désir d’autonomie. Ils se portent alors comme premiers contestataires de la société de consommation à travers leur manifestation dans les rues à travers le pays.

Ce contexte empli tension se reporte forcément dans le domaine musical, de nombreux chanteurs analyseront ces phénomènes pour mieux critiquer les idées de la société d’avant mai 68.

C’est le cas de Claude Nougaro qui la juge alors trop inflexible, c’est à la sortie des manifestations qu’il chante «Paris Mai», où il montre à travers ses paroles sarcastiques la confusion de l’état français et de son peuple, elle sera interdite d’antenne. Renaud, jeune interprète de 16 ans, se relie également à cette cause.

“Crève salope” est la première chanson du compositeur et interprète Renaud, écrite à l’âge de 16 ans. Le chanteur aurait été inspiré par un tract du même nom, publié à Bordeaux en avril 1968.
Elle fut chantée a cappella dans la Sorbonne occupée mais n’a jamais été éditée en disque. Plus tard elle fut reprise sur les barricades et devint le signe de ralliement des étudiants en colère. Devenue un « mini hymne » de Mai 1968, “Crève Salope” montre bien ce climat révolutionnaire contre cette France conservatrice.
La « salope » c’est la société de 1968. Chaque couplet dénonce une forme d’autorité (paternelle, professorale, policière et religieuse). À la fin de la chanson, l’autorité de l’État met fin à cette rébellion.

De nouvelles idéologies et concepts ressortent alors de ces manifestations étudiantes, tel que l’écologie comme le montre Maxime Le Forestier.
En effet, dans sa chanson « Comme un arbre », il se compare à un arbre et les champs lexicaux antithétiques de la nature et de l’urbanisation font ressortir cette idéologie nouvelle. Cet auteur, compositeur et interprète s’adresse à son « ami » c’est-à-dire à l’Homme soucieux de la nature, principalement le Hippie.
Les hippies sont des groupe d’hommes et de femmes qui viennent principalement d’Europe Occidentale et d’Amérique du Nord. En effet, ce mouvement, dont l’égérie est la chanteuse Janis Joplin, est né à San Francisco autour des années 1965.
Les chocs pétroliers de 1973 et 1978 pousse la France dans une crise profonde, c’est la fin des années de prospérité et de la grande croissance. Le chômage reste le problème majeur dont les taux s’accroissent fortement. En 1979 Eddy Mitchell chante « Il ne rentre pas ce soir », où il illustre le véritable désarroi du peuple. Durant ces années difficiles, il existe une quête d’identité et les chansons se portent davantage sur le domaine médiatique.

Au début des années 1970 il y a une forte remise en cause de certaines valeurs de la société comme le confort, l’accumulation des biens matériels. La recherche de nouvelles normes se fait parle rejet du conformisme de cette société matérialiste. On prône alors une volonté de liberté individuelle ainsi que l’abandon de certains principes solidement encrés. Ceci entraîne un succès des chansons évoquant le nomadisme, la contre-culture de l’errance où le voyage devient le thème majeur de la génération suivant la révolution de l’année 1968. Maxime le Forestier chante en 1975 Le Saltimbanque mais aussi Guy Bontempelli avec « Quand je vois passer un bateau ».

De nombreux chanteurs décident de plus en plus de traduire le malaise de la société face à la crise. Souchon est l’un de ceux qui montre le mieux les malaises des années 70, comme dans « Allo maman bobo » (traduction de la fragilité et de la vacuité de la société de l’époque). Ou encore France Gall qui évoque dans «Si, maman, si» le malaise d’une génération qui n’arrive pas à trouver sa place dans la société où les normes paraissent dérisoires. Jean Patrick Capdevieille en 1979 «Quand t’es dans le désert» mais également Alain Bashung dans «C’est comment qu’on freine» où il s’interroge sur la façon dont cette période se stoppera.

C’est alors que les français rentrent dans une nostalgie. Ils regrettent les années 60. Les sixties apparaissent comme un temps où tout était possible. C’est sans aucun doutes, Eddy Mitchell qui traduit le mieux la nostalgie devant un monde qui change trop vite à leurs yeux. C’est pourquoi le thème du regret de l’enfance surgit Eddy Mitchell reprend en 1984 «Comme quand j’étais môme» et Renaud à son tour interprète «Mistral gagnant» en 1985. Parallèlement, nous pouvons constater une tendance à regarder en face les difficultés et à en triompher, à refuser de se laisser emporter par la morosité ambiante.

Étrangement de nombreuses chansons aux textes noirs connaissent un succès important, notamment « Disparue » en 1982 qui évoque les rafles politiques en Amérique du Sud.
Le rock de la dérision et de la violence caractérise le refus des valeurs, il délivre un message critique sur la société à tendance provocateur.

C’est ainsi que le groupe Téléphone commence à apparaître dès 1978. Ces groupes contestataires évoquent les interrogations d’une jeunesse en mal de vivre : « J’suis parti de chez mes parents, j’sais pas quoi faire ? » chante Jean-Louis Aubert du groupe Téléphone.

Au delà des chanteurs il y a aussi des comiques qui s’engagent comme Coluche avec sa chanson Misère en 1978 où il dénonce la pauvreté qui touche de plus en plus les français.

Le 26 septembre 1985 Coluche décide de créer les Restos du coeur, association ayant pour but de distribuer gratuitement de la nourriture aux personnes dans le besoin. Il décide alors de faire une annonce spontanée à la radio «J’ai une petite idée, comme ça… Si y’a des gens qui sont intéressés pour sponsoriser une cantine gratuite qu’on commencerait par faire à Paris et puis qu’on étalerait dans les grandes villes de France». C’est ainsi qu’il réussit à former sa bande “d’Enfoirés” en un hiver, ceci devenu alors un moyen médiatique très populaire afin que l’on porte un regard sur son action.

Les berurier noir est un groupe qui créer leur succès sur leur engagement et en dénoncer les maux de la société française (Algérie, FN, sectes, folie, violence, police), l’une de leur chanson est « On a faim » en 1987.

En conclusion, nous avons pu remarquer que la musique engagée française s’est toujours adaptée aux événements politiques et sociaux de son époque ; que ce soit par un contexte de crise, révolutionnaire ou même de croissance. Ainsi nous pouvons conclure que la musique engagée se porte garante des ressentis de ses citoyens tout en ayant pour but de leur faire adopter un réel regard critique de leur entourage quotidien.

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